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[ÉDITO] Pas de retour de la taxe d’habitation mais « une contribution modeste »… ~ Songkrah

Capture d'écran
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Il faut se méfier de la modestie en matière fiscale.

Et voici que le serpent de mer de la taxe d’habitation refait sur surface.

 C’est François Rebsamen, ministre de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation, qui vient de l’évoquer, dans un entretien à Ouest-France, à la veille d’une réunion avec les associations des collectivités. Mais attention, celui qui fut longtemps maire et qui est toujours conseiller municipal de Dijon (on ne sait jamais, un remaniement, une censure, c’est si vite arrivé…) dit bien qu’il ne s’agit pas de recréer la taxe d’habitation mais simplement d’instaurer « une contribution modeste ». Pour quoi faire ? L’idée, de prime abord, est vertueuse : pour le « financement des services publics de la commune » et « renouer le lien » entre les collectivités et les citoyens qui y résident. En 2024, son prédécesseur, Catherine Vautrin, n’avait pas dit autre chose, elle avait proposé une concertation, début 2025, avec les élus locaux au sujet d’une participation « au fait de vivre dans une commune ». Nous y sommes ! Mais, avait-elle ajouté, « il n’y aura pas de retour à la taxe d’habitation ».


Suppression de la taxe d'habitation : piège diabolique

L’exercice est compliqué, pour ne pas dire casse-gueule : comment s’extirper du piège diabolique et démagogique dans lequel Emmanuel Macron a précipité les communes, en 2017, sans jeter au bûcher ce qu’il reste du macronisme des premiers temps ? Le candidat du nouveau monde avait décrété que cet impôt était injuste et qu’il fallait le supprimer tout de suite, un peu comme si on avait aboli la gabelle, la taille et le droit de mainmorte. Le supprimer tout de suite ? Pas tout à fait, car le principe de réalité financière avait conduit à supprimer progressivement cet impôt, créant ainsi une sorte d’inégalité des citoyens devant l’impôt. Pas tout à fait, non plus, puisqu’on a maintenu cette taxe pour les résidences secondaires selon un principe échappé d’une maison de fous : moins tu habites la commune, plus tu contribues au fonctionnement des services dont tu ne bénéficies qu'occasionnellement ! Avec, même, pour les conseils municipaux, le pouvoir d’alourdir jusqu’à 60 % cette taxe. Tant qu’à faire, et selon un autre principe qu’il vaut mieux toujours taper sur les mêmes, car cela fait moins de mécontents…

Piège diabolique, disions-nous, car cette suppression de la taxe d’habitation a coupé un lien essentiel entre le citoyen-contribuable et la commune. Vautrin et Rebsamen, qui sont des élus locaux (à la différence de Macron), l’ont bien compris. En nationalisant l’impôt, Macron a d'ailleurs fait un mal irréparable au processus de décentralisation. Du reste, on se demande bien à quoi sert le portefeuille de la Décentralisation détenu par Rebsamen ! Piège diabolique, ensuite, car beaucoup de communes, avec la suppression de la taxe d’habitation, non complètement compensée par les dotations de l’État, ont été obligées d’agir, pour faire face à leurs dépenses, sur le seul levier fiscal qu'il leur reste : la taxe foncière, qui repose sur les seuls propriétaires. Or, comme le fait remarquer justement Rebsamen, « être propriétaire de son logement ne signifie pas forcément être riche ». L’homme parle d’or.


C'est quoi, une « contribution modeste » ?

Alors, une « contribution modeste » ? C’est quoi, au juste ? En pleine chasse aux économies dans le budget de l’État, on voit ce qui se profile à l’horizon. On baissera (modestement ?) les dotations de fonctionnement de l’État aux communes et, en échange, on donnera à ces mêmes communes le droit de lever une « contribution modeste ». Le taux en sera fixé par le conseil municipal, qui pourra le faire évoluer d’année en année (généralement, en l’augmentant...). Au fil du temps, cette contribution pourra passer de « modeste » à « légèrement au-dessus de la moyenne des communes de la même strate », après des stades intermédiaires que l’on qualifiera pudiquement de « modéré » puis de « raisonnable », etc. La langue française est d’une extraordinaire richesse – à la différence de nos caisses – pour justifier une augmentation d’impôts, de taxes ou de contribution, modeste à son origine. Une augmentation qui sera du fait des communes et non de l'État ou du Parlement, qui pourront s'en laver les mains. La dépense publique est une drogue dure, bien française, qui fait des ravages à tous les niveaux où l'on dispose de l'argent public, c'est-à-dire celui des contribuables.

Rappelons-nous que le taux de la CSG commença, très modestement, sous le socialiste Rocard, en 1991, à 1,1 %, pour atteindre, aujourd'hui, 9,2 % sur les revenus d’activité... Il faut se méfier de la modestie en matière fiscale.

songkrah.blogspot.com

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